DMLA : implantation d'une rétine artificielle pour retrouver la vue

Dans le cadre de l’étude européenne PRIMAvera, une première implantation d’une rétine artificielle a été réalisée aux Hospices Civils de Lyon, le 28 septembre, sur une patiente atteinte de DMLA (dégénérescence maculaire liée à l’âge).

Martine, 72 ans, est atteinte par la forme atrophique (dite « sèche ») de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) depuis l’âge de 49 ans. Le 28 septembre, elle est devenue la cinquième patiente au monde, la première au sein des Hospices Civils de Lyon, à recevoir une rétine artificielle, dans le cadre de l’étude européenne PRIMAvera. Reposant sur la technologie PRIMA développée par la start-up de bioélectronique française Pixium, cette nouvelle rétine devrait lui permettre de recouvrer une partie de sa vision.

« J’attends de pouvoir relire, me maquiller pour sortir avec les copines, voir ce qu’il y a dans mon assiette », se réjouit déjà la septuagénaire.

L’intervention, pratiquée par le professeur Laurent Kodjikian, chef de service adjoint en ophtalmologie de l’hôpital de la Croix-Rousse, a duré deux heures et demi, « contre les quatre ou cinq heures prévues », précise le chirurgien, ancien président de la Société française d’ophtalmologie. Réalisée au microscope, elle a nécessité une concentration et une dextérité de tous les instants. « Il s’agit d’arriver à placer une puce bionique (de 2 mm de large et 0,03 mm d’épaisseur) sous la rétine, décrit-il. La chirurgie rétino-vitréenne est ma spécialité, mais c’est la première fois que j’effectuais quelque chose d’aussi particulier. Il a fallu ouvrir la rétine sur 3,5 mm, ce qui est conséquent, puis créer un décollement de rétine pour positionner l’implant, en sachant qu’avec la DMLA atrophique, la rétine devient particulièrement fine, usée et se décolle très difficilement ».

Ce « défi chirurgical énorme », accompli avec la seule main du praticien des HCL, s’est parfaitement déroulé. « J’ai revu Martine un mois après l’intervention. Le résultat post-opératoire s’avère excellent. Il n’y a aucune complication, la puce est parfaitement en place et la vision n’a pas été dégradée par l’opération. Elle devrait maintenant commencer à s’améliorer grâce à la rééducation », se félicite le spécialiste.

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L’implant rétinien est situé sur la zone dégénérée plus claire sur l’image. On peut voir les cellules électroniques de la puce, chacune représentant un pixel de l’image initialement capturée par la caméra. L’implant est conçu pour fournir une image composée de quelques centaines de pixels. Une image détaillée, comme une photographie, nécessiterait des dizaines de milliers de pixels. L’image obtenue dans le cadre de l’étude est donc grandement simplifiée.

 

L’acuité visuelle se mesure à partir de l’échelle ETDRS, le fameux tableau de lettres couramment utilisé dans les cabinets d’ophtalmologie. Depuis que la DMLA atrophique la ronge, Martine ne peut lire que 9 lettres ETDRS, quand une vision normale se situe autour de 85 lettres.

« L’objectif de l’étude clinique PRIMAvera consiste en un gain d’acuité d’au moins 10 lettres, au terme de la rééducation. C’est ambitieux, mais un tel résultat serait considérable, permettant aux patients de retrouver une certaine autonomie dans la vie quotidienne », souligne le professeur.

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L'échelle ETDRS
L'échelle ETDRS permet de mesurer un score d'acuité visuelle.

 

Après avoir parfait les réglages de sa rétine artificielle, la septuagénaire a effectué sa première session de rééducation le 7 décembre auprès des orthoptistes de la Fidev*. S’ensuivront des séances hebdomadaires pendant au moins un an. « Le processus est lourd, mais Martine se montre particulièrement motivée, confie son chirurgien. Sa détermination fut l’un des principaux critères de sa sélection pour cette étude clinique, sachant que cette chirurgie restait expérimentale avec un certain nombre de risques ».

A la suite de cette première patiente, un autre septuagénaire atteint de la DMLA atrophique s’apprête à recevoir, à son tour, une rétine artificielle par la main experte du professeur Laurent Kodjikian. Suivi par ce dernier depuis une dizaine d’années au sein du service ophtalmologie de l’hôpital de la Croix-Rousse, Maurice, 72 ans, habitant de Saint-Quentin-sur-Isère (Isère) doit être opéré le 14 décembre. Et d’autres patients pourraient suivre dans les prochains mois, toujours dans le cadre de l’étude clinique PRIMAvera.

Les HCL, site pilote de l’étude clinique européenne PRIMAvera

Les Hospices Civils de Lyon font partie des six centres français sélectionnés pour collaborer, en avant première, à l’étude PRIMAvera. Promue par la société française Pixium, cette étude clinique a débuté, fin 2020, sa phase III, dernière étape avant une d emande d'autorisation de mise sur le marché (AMM).
Après la France, d’autres sites tests ont été ouverts en Allemagne, en Espagne, aux Pays Bas et en Italie au cours du second semestre 2021. Au total, 38 patients participeront à l’étude PRIMAvera destinée aux personnes atteintes de DMLA atrophique. Maladie de la rétine, la DMLA est la première cause de handicap visuel chez les plus de 50 ans dans les pays développés. La prévalence de la maladie augmente avec l’âge pour dépasser 25% de la population aprè s 75 ans. À ce jour, il n’existe aucun traitement de la forme atrophique (ou "sèche") de la maladie.
L’objectif de l’étude clinique PRIMAvera est de confirmer la sécurité et l'efficacité du système de rétine artificielle PRIMA, avant une éventuelle AMM. Elle comprendra un suivi sur trois ans et uneévaluation des critères principaux douze mois après l’implantation.

*Formation insertion et réadaptation pour déficients visuels, établissement privé à but non lucratif basé 5 place des Frères-Voisin à Lyon 8e.

La rétine artificielle PRIMA est composée de trois éléments principaux :
- un implant rétinien miniature sans fil
- une paire de lunettes équipée d'une caméra et d’un projecteur
- un processeur de poche connecté au projecteur
La caméra capte les scènes visuelles de l’environnement, le processeur traite et simplifie les images grâce à des algorithmes issus de l’intelligence artificielle. Les images simplifiées sont ensuite renvoyées vers les lunettes où le projecteur numérique miniaturisé projette les images traitées, via un faisceau infrarouge, sur l’implant équipé de récepteurs photovoltaïques. Ces récepteurs convertissent alors les informations optiques en stimulation électrique que les cellules nerveuses de la rétine interne fonctionnant toujours vont recevoir et transférer via le nerf optique au cerveau, déclenchant ainsi une perception.

Voir aussi
Dernière mise à jour le : mar 25/01/2022 - 09:55
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DMLA : une rétine artificielle pour retrouver la vue (Reportage France 3)

Croix-Rousse : une puce pour retrouver la vue (Reportage BFM Lyon)

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