DIAB-eCARE, une prise en charge novatrice

Il y a tout juste deux ans, les HCL ouvraient DIAB-eCARE, un centre de prise en charge du diabète sans équivalent en France. Organisation, soins, recherche clinique, outils digitaux… ce service 100 % « hors les murs » innove dans tous les domaines.

Dans l’impressionnante salle d’attente, David*, étudiant d’une vingtaine d’années, patiente. Il y a quelques semaines, il a rejoint les quelques 180 000 personnes en France atteintes de diabète de type 1. Son pancréas, véritable « usine à insuline » ne fonctionne plus, les cellules bêta des îlots de Langerhans chargées de maintenir le taux de glucose dans son sang ayant définitivement cessé leur travail. Sa chance, en revanche, c’est d’avoir été orienté vers le centre du diabète Diab-e-Care de Lyon par le CHU de Grenoble, où il a été diagnostiqué.
« Uniquement dédié au diabète de type 1, notre centre ouvert le 15 juin 2020 prend en charge plus de 2 000 patients, adultes et adolescents de toute la région Auvergne-Rhône-Alpes et bien au-delà », se félicite le Pr Charles Thivolet, endocrinologue et diabétologue, qui aime comparer son service à une marguerite dont les pétales représentent les activités : consultation, éducation thérapeutique, recherche clinique, télémédecine, soutien psychologique, pose de pompes à insuline, activité physique adaptée.

Dédramatiser la maladie

Rattaché aux Hospices Civils de Lyon, DIAB-eCARE, véritable ovni dans le monde hospitalier, fait nid à part. Installé dans les locaux flambant neuf de la maison de santé Medicina Rockefeller, dans le 8e arrondissement, rien ne laisse penser que l’on est dans un hôpital. Ni la salle d’attente feutrée aux canapés XXL, ni la signalétique des box portant des noms de villes, ni les pratiques tournées vers l’autonomisation des patients et encore moins l’organisation.

« Nous sommes loin du paysage conventionnel de l’hôpital », concède en souriant le Pr Thivolet. « Et c’est exactement ce que nous souhaitions. Notre objectif était d’être suffisamment réactifs, mais également d'offrir aux sujets porteurs d’un diabète de type 1 un cadre de soins capable de dédramatiser la maladie avec une forte orientation vers les nouvelles technologies. » Visiblement, ça fonctionne, comme en témoignent, accrochées aux murs, ces mosaïques de visages souriants de patients et de soignants en train de danser, de pédaler, de nager… ou encore le sourire de Nadège* dont le ventre arrondi prouve que l’on peut vivre pleinement malgré la maladie.

« J’ai profité de sa venue en consultation pour dépister une éventuelle rétinopathie, explique Émilie, infirmière, un examen proposé sur place pour simplifier la prise en charge des patients. » Les images seront télétransmises au service d’ophtalmologie de l’hôpital Edouard Herriot de la Pr Carole Burillon  pour interprétation.

Image
Diab-ecare : réalisation d'un fond d'oeil
Grâce à un matériel dernier-cri, Émilie réalise un fond d'œil qu'elle transfèrera au service d'ophtalmologie d’Édouard Herriot pour interprétation.

 

« Savoir-faire, compétences, informatique, téléphonie, personnel… tout est 100 % Hospices Civils dans un environnement moderne et agréable », résume Sophie Brunot, infirmière coordinatrice du centre, qui souligne que le reste à charge pour le patient est de zéro.

Des patients sous haute (télé)surveillance

Si simplifier la vie des patients chroniques est le leitmotiv du service, innover est un autre cheval de bataille de DIAB-eCARE. Par exemple, sans bureau des entrées, le guichet d’accueil assure le trois en un en réunissant accueil, admission, dossier administratif. Ainsi, ici, la pose d’une pompe à insuline et la formation à sa manipulation se font en une demi-journée, là où, partout ailleurs, une hospitalisation est nécessaire.

« Dans le cadre de l’article 51**, notre centre est le seul en France autorisé à réaliser cette pose lors d’une consultation, assortie d’un télésuivi de trois mois », se félicite le Pr Thivolet. C’est la qualité de ce suivi qui amène ici David, l’étudiant croisé dans la salle d’attente. Porteur d’une pompe à insuline posée au CHU de Grenoble, il va désormais bénéficier d’une prise en charge pluridisciplinaire dispensée par l’équipe de quatorze professionnels (médecins, diététiciennes, coach activité physique adaptée, psychologue, infirmières dont une en pratique avancée en cours de formation, secrétaire) mais aussi avoir accès à la recherche clinique comme les programmes de boucle fermée (pancréas artificiel) ou les thérapies cellulaires. Le tout à distance via la télésurveillance, grâce au partenariat tissé entre DIAB-eCARE et la start-up française Glooko XT.
En ce dernier jour des vacances de printemps, c’est Keren qui « téléveille » sur les patients. Casque-micro vissé sur la tête, elle accède à leurs données grâce à une application qu’ils ont téléchargée sur leur smartphone. Sur son écran s’affichent le débit de la pompe, le taux d’insuline, la glycémie, le nombre de pas parcourus jusqu’aux menus… « Avec mes trois collègues et la diététicienne, nous suivons ainsi un pool de 250 patients dispatchés dans toute la France qui se renouvelle régulièrement », détaille Keren entre deux appels. Ce suivi permet d’éviter un certain nombre d’hospitalisations et renforce le suivi conventionnel.

Vers l'autonomie, y compris pour les plus jeunes

C’est d’ailleurs en compagnie de Mathilde, coach en activité physique adaptée (APA), que David découvre la salle de sport au rez-de-chaussée du bâtiment. « Mon rôle est de leur donner des conseils pour éviter les hypoglycémies, de partager l’état des connaissances et de leur montrer des exercices faciles à reproduire chez eux, afin de les rendre autonomes. » Une éducation thérapeutique au cœur des préoccupations du centre, qui compte déjà deux patients-partenaires et un premier patient-expert. « Il intervient dans des groupes de parole sur les dispositifs à boucle fermée », indique Sophie Brunot en saluant Julie, la puéricultrice en route pour « San Francisco », une peluche lion à la main, Ludo* sur les talons. L’adolescent à la tignasse brune fait partie des quelque 330 jeunes de 10 à 18 ans suivis au centre DIAB-eCARE.
« Nous avons donc mis en place, en lien avec le Pr Marc Nicolino, pédiatre à l’hôpital Femme Mère Enfant, un programme “ Transition” en trois actes — À vos marques, Prêts, Partez —, visant à développer leur autonomie à l’entrée en sixième, lors du passage du collège au lycée, puis du lycée à la vie adulte », partage Julie, qui souligne que DIAB-eCARE est le seul centre à réunir les compétences pédiatriques et adultes.

Prochaine étape : la mise en œuvre d’un programme « Perdus de vue » pour tenter de rattraper les 20 % d’ados qui arrêtent de se faire suivre. Sexualité, addictologie, risques de la vie, permis de conduire…

« Le diabète oblige ces jeunes à être vigilants au moment de la vie où on en a le moins envie », constate Julie. « Nous fonctionnons comme un laboratoire expérimental qui cherche à démontrer que la valeur ajoutée, en santé, permet un gain sur la qualité de vie et un meilleur équilibre qui limite le risque de complications », conclut le Pr Thivolet.

Image
Rendre les jeunes autonomes dans la prise en charge de leur diabète

 

* Les prénoms ont été modifiés.

** Introduit dans l’article 51 à la faveur de la loi de financement de la Sécurité sociale de 2018, un dispositif permet à un établissement hospitalier d’expérimenter de nouvelles organisations en santé contribuant à améliorer le parcours des patients, l’efficience du système de santé, l’accès aux soins ou encore la pertinence de la prescription des produits de santé.

Dernière mise à jour le : mar 21/06/2022 - 10:03