Greffe d'îlots de Langerhans

Résumé
Chez les personnes atteintes de diabète de type 1, les cellules du pancréas ne produisent plus d'insuline. Prélevés sur un donneur décédé, les îlots pancréatiques sont injectés dans une veine qui transporte le sang vers le foie. Une fois implantés, les îlots reprennent leur fonction naturelle : produire de l'insuline, régulant ainsi le taux de sucre dans le sang.

Les îlots de Langerhans, c'est quoi ?

Le pancréas est un organe qui fabrique des hormones pour aider le corps à digérer et à utiliser les aliments. Les îlots pancréatiques, également appelés îlots de Langerhans, sont des groupes de cellules localisés dans le pancréas. Ils contiennent plusieurs types de cellules, y compris les cellules bêta, qui fabriquent l’hormone insuline. Cette hormone aide le corps à utiliser le glucose comme source d’énergie et à contrôler le niveau de sucre dans votre sang, également appelé glycémie.

Qu’est-ce que la greffe d’îlots de Langerhans et comment peut-elle traiter le diabète de type 1 ?

Chez les personnes atteintes de diabète de type 1, le système immunitaire attaque et détruit les cellules bêta. Elles doivent donc s’injecter de l’insuline plusieurs fois par jour car leur corps ne fabrique plus cette hormone.

Les îlots greffés pour traiter le diabète de type 1 sont obtenus à partir d’un pancréas prélevé chez un donneur d’organes décédé. Chez une personne atteinte de diabète de type 1, les îlots sont injectés dans une veine, appelée veine porte, qui transporte le sang vers le foie. Une fois implantés dans le foie, ils commencent à fabriquer et à libérer de l’insuline dans le corps du receveur. Le plus souvent, deux à trois injections d’îlots sont nécessaires pour permettre le succès de la greffe. La greffe d'îlots est un traitement reconnu du diabète de type 1.

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Adapté du modèle «Pancreatic Islet of Langerhans» de BioRender.com (2024). Obtenu de https://app.biorender.com/biorender-templates

Quels sont les patients éligibles à la greffe d'îlots de Langerhans ?

Pour être candidat à une greffe d'îlots, il faut être atteint d'un diabète de type 1 et présenter l'une des 3 situations suivantes.

  • Situation n°1 : les personnes atteintes de diabète de type 1 instable altérant la qualité de vie, notamment en raison d’hypoglycémies mal ou non ressenties, fréquentes et/ou sévères.

Les médecins envisagent la transplantation si les bénéfices l’emportent sur les risques. Les receveurs devront ensuite prendre des immunosuppresseurs à vie.

  • Situation n°2 : les personnes atteintes de diabète de type 1 qui ont reçu une greffe de rein pour traiter une insuffisance rénale. La greffe d’îlots peut être réalisée après une greffe de rein.

Les receveurs prennent déjà des immunosuppresseurs pour prévenir le rejet du rein greffé. Par conséquent, la greffe d’îlots n’ajoute pas beaucoup plus de risque, en dehors de celui de la procédure.

  • Situation n°3 : les personnes atteintes de diabète de type 1 qui a provoqué une insuffisance rénale et nécessitant donc une dialyse ou une prise en dialyse imminente.

La greffe d'îlots peut être réalisée en même temps qu'une greffe de rein.

D’autres conditions peuvent se poser. Il faut en discuter avec le médecin diabétologue ou spécialiste en transplantation.
Tous les patients atteints d’un diabète de type 1 n’ont pas besoin d’une greffe d’îlots. Les progrès technologiques dans la prise en charge du diabète (capteurs de glycémies, pompes à insuline, systèmes en boucle fermée) ont permis d’améliorer l’équilibre du diabète et la qualité de vie, et de diminuer le risque de complications.

Quel parcours pour le patient ?

Le bilan pré transplantation

Il permet d’informer le patient sur les bénéfices et les risques de la greffe d’îlots, et d’évaluer si elle est une bonne option thérapeutique pour lui. Cette première étape consiste principalement en un bilan biologique (prise de sang et analyse d’urine), des examens d’imagerie et des consultations avec les professionnels de l’équipe : infirmière coordinatrice des bilans pré transplantation, diabétologue, spécialiste de la transplantation, radiologue interventionnel et anesthésiste. À l’issue du bilan, lors d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP), les professionnels valident ou non l'inscription du patient sur la liste d’attente.

Inscription sur liste d'attente

Le patient peut être appelé à tout moment pour la greffe et doit faire une prise de sang tous les 3 mois (recherche d’anticorps antiHLA qui permet d’évaluer la comptabilité avec les donneurs).

Lors de l’appel de greffe

Le patient se rend à l’hôpital dans le service de transplantation où un bilan est réalisé pour vérifier qu’il n’y ait pas de contre-indication à réaliser la transplantation (pas d’infection en cours par exemple). Pour la première injection d’îlots, le traitement antirejet débute 2 jours avant par voie intraveineuse. Puis l’hospitalisation dure en moyenne de 7 à 10 jours au cours desquels les doses d’insuline sont adaptées.

La sortie

Après l’hospitalisation, le patient est suivi en consultation en alternant avec le spécialiste de transplantation et le diabétologue de l’équipe ou son diabétologue référent. Un bilan est réalisé rapidement après l’injection pour évaluer s’il peut être remis sur liste d’attente pour la seconde injection. Il est alors prioritaire pour compléter la greffe. La seconde et éventuellement la troisième injection d’îlots se déroulent comme la première, en dehors du fait que l’hospitalisation débute le jour de l’injection et non 2 jours avant.

Le suivi post-greffe

Lorsque la greffe est terminée, le patient est suivi par l’équipe de transplantation en lien et en alternance avec son diabétologue et son médecin traitant. Le suivi permet d’évaluer l’efficacité de la greffe d’îlots et de dépister d’éventuelles complications liées à l’immunosuppression. Le suivi débute par une fréquence mensuelle la première année, puis se réduit progressivement pour devenir semestriel à long terme, si tout va bien.

Les immunosuppresseurs

Après une greffe d’îlots, les receveurs prendront des médicaments, appelés immunosuppresseurs, tant que les îlots transplantés fonctionneront. Ces médicaments aident à empêcher le corps de les rejeter. Le rejet se produit lorsque le système immunitaire du corps les considère comme « étrangers » et tente de les détruire. Si le receveur arrête de prendre des immunosuppresseurs, son corps rejettera les îlots transplantés et ils cesseront de fonctionner. Les immunosuppresseurs peuvent avoir des effets secondaires, tels que :

  • un risque plus élevé de contracter des infections
  • un risque plus élevé d’avoir certains types de tumeurs
  • des effets secondaires digestifs : vomissements, nausées ou diarrhées
  • des maux de tête et des tremblements
  • une hypertension artérielle
  • des taux plus élevés de cholestérol et de triglycérides dans le sang
  • une toxicité pour les reins

Comment la transplantation d’îlots est-elle réalisée ?

La procédure d’isolement des îlots de Langerhans est réalisée dans un laboratoire par une équipe spécialisée. Tout d’abord, les îlots sont extraits du pancréas d’un donneur décédé. Les îlots sont ensuite purifiés et comptés. En moyenne, environ 250 000-500 000 îlots sont transplantés dans chaque procédure.

Le receveur reçoit le plus souvent un anesthésique local et un sédatif pendant la procédure. Dans certains cas, une anesthésie générale peut s’avérer nécessaire. Ensuite, la procédure d’injection consiste à insérer un tube fin et flexible, appelé cathéter, à travers une petite incision dans la partie supérieure de l'abdomen. Un radiologue utilise des rayons X et des ultrasons pour guider le cathéter dans la veine porte du foie.

Les îlots sont lentement perfusés à travers le cathéter vers le foie, comme lors d’une transfusion sanguine.

Une autre technique est possible : une procédure de chirurgie peu invasive (même cicatrice que pour une opération de l’appendicite) qui permet de visualiser directement une veine près du foie pour insérer le cathéter.

Au cours des semaines suivantes, de nouveaux vaisseaux sanguins se forment et relient les îlots à ceux du receveur. Les cellules bêta des îlots commencent à fabriquer et à libérer de l’insuline dans le sang immédiatement après la greffe. Cependant, il faut 2 à 3 semaines avant qu’ils fonctionnent à leur maximum.

La procédure d’isolement ne permet que rarement d’obtenir une quantité suffisante d’îlots pour arriver à un résultat optimal. Pour cette raison, chez la majorité des patients, il est nécessaire de réaliser une seconde, voir une troisième injection d’îlots, à partir de donneurs supplémentaires.

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Quelle est l’efficacité de la transplantation d’îlots ?

Des essais cliniques réalisés en France et aux Etats-Unis ont permis d'examiner les résultats associés à la transplantation d’îlots.

Les études ont montré que, 1 an après la transplantation d’îlots, près de 9 receveurs sur 10 avaient un taux d’HbA1c inférieur à 7%, c’est-à-dire que leur glycémie moyenne sur les 3 mois précédents étaient dans les cibles, et qu'ils n’avaient pas d’épisode d’hypoglycemie sévère. Environ la moitié d'entre eux ont pu arrêter les injections d’insuline et ces résultats étaient maintenus chez la moitié des receveurs jusqu’à 3 ans après la greffe.

Les recherches liées à ces études ont également révélé que les receveurs de greffe d’îlots souffrant de diabète, ont connu des améliorations significatives de leur qualité de vie et ont signalé un meilleur état de santé général. Même les receveurs qui avaient encore besoin de prendre de l’insuline pour gérer leur diabète ont rapporté ces améliorations.

Quels sont les avantages et les risques de la transplantation d’îlots ?

Avantages

Les receveurs peuvent voir les avantages suivants dans leur quotidien : 

  • la baisse du niveau de glycémie et de ses variations 
  • la réduction ou l’arrêt complet des injections d’insuline
  • une meilleure reconnaissance des symptômes d’hypoglycémie
  • la disparition du risque d’hypoglycémie sévère avec perte de connaissance et/ou du besoin d’aide d’une tierce personne pour traiter l’hypoglycémie.

Les recherches médicales suggèrent également que la transplantation d’îlots peut prévenir ou ralentir le développement de complications du diabète telles que les maladies cardiaques, les maladies rénales et les lésions nerveuses ou oculaires. Ceci est particulièrement important pour la protection du greffon rénal chez les patients transplantés d’un rein auparavant ou simultanément.

Risques

Les principaux risques de la procédure d’injection d’îlots sont :

  • douleurs après la procédure
  • saignements
  • thrombose (caillot sanguin) dans la veine porte du foie

Ces risques de complication sont faibles et moindres que lors de la transplantation d’autres organes.

Les autres risques sont semblables à ceux de la transplantation d’autres organes :

  • les risques que les îlots transplantés ne fonctionnent pas bien ou cessent de fonctionner
  • les effets secondaires des médicaments anti-rejet, également appelés immunosuppresseurs
  • le développement d’anticorps contre les cellules du donneur, ce qui peut rendre plus difficile la recherche d’un donneur d’organe approprié si une autre greffe est nécessaire par la suite

La greffe d’îlots est-elle utilisée pour traiter d’autres affections ?

Certains autres types de diabète, qui ne sont pas des diabètes de type 1, peuvent également être traités par une greffe d’îlots. C’est par exemple le cas pour :

  • les diabètes survenus après une ablation complète du pancréas
  • le diabète observé en cas de mucoviscidose
  • d’autres formes de diabète plus rares

Le diabète de type 2, observé le plus souvent chez des personnes d’âge mûr et en surcharge pondérale, ne représente pas, en principe, une indication à la greffe d’îlots. Les médecins peuvent également effectuer un autre type de transplantation d’îlots appelée auto-transplantation d’îlots, chez les personnes dont le pancréas entier a été retiré pour traiter une pancréatite sévère et chronique, ou certains types de tumeurs. Mais les personnes atteintes de diabète de type 1 ne peuvent pas recevoir d’autotransplantation d’îlots.

Dans l’auto-transplantation d’îlots, les médecins retirent le pancréas du patient, extraient ses îlots et les transplantent dans son foie. L’objectif est de donner au corps suffisamment d’îlots sains qui produisent de l’insuline. Le patient n’a pas besoin de prendre d’immunosuppresseurs après l’intervention car il reçoit des îlots de son propre corps.

L’alternative à la greffe d'îlots

La transplantation du pancréas est une alternative à la greffe d’îlots qui présente d’excellents résultats sur le long terme en cas de succès. Cependant, il s’agit d’une intervention chirurgicale majeure avec un risque de complication significatif. Les indications à la greffe d’îlots et à la transplantation du pancréas sont théoriquement identiques, mais une évaluation des risques et des bénéfices doit être effectuée individuellement pour chaque patient en tenant compte des spécificités de chaque situation et des objectifs que l’on souhaite atteindre.

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