"Participer à la recherche donne du sens à mon action" : Laurie Panse, consultante en partenariat en santé

Après avoir connu la maladie et une prise en charge de longue durée, Laurie Panse a changé de vie. Elle est devenue consultante en partenariat en santé. Elle fait ainsi entrer l’expérience du patient dans les protocoles de recherche hospitalo-universitaire. 

Cheffe de projet dans un grand groupe de téléphonie mobile, Laurie Panse est en pleine ascension professionnelle. À 33 ans, l’ingénieure en développement web se voit poursuivre sa carrière dans les télécommunications, gravir les échelons, prendre davantage de responsabilités. Jusqu’à ce que le cancer fasse irruption dans sa vie.

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Femme souriante, aux cheveux blonds, avec un pull rouge avec une etoile. Elle est accoudée à une table dans le couloir d'un hopital.
Laurie Panse est consultante en partenariat en santé.

 

Diagnostiquée fin 2015, elle doit suivre un traitement lourd : chimiothérapie, mastectomie, radiothérapie... Il durera un an. Elle perd ses cheveux, se bat pour accepter l’image que lui renvoie le miroir, subit des grands moments de fatigue. La période n’est pas facile : « la fin des traitements a accentué un sentiment de solitude. Je n’avais plus de lien avec l’hôpital. Nous avions déménagé. Mes repères n’étaient plus les mêmes. »

Fort heureusement, elle est entourée : un mari, un enfant, avant la naissance du deuxième en 2019. Quatre ans après l’intervention chirurgicale, elle opte pour une reconstruction mammaire par lambeau de grand dorsal et lipofilling.

Capitaliser sur son expérience en faveur du patient

Après cinq ans de traitements et trois ans d’investissement dans le monde associatif, - de 2019 à 2022, elle sera présidente du Gefluc (groupement des entreprises françaises dans la lutte contre le cancer Lyon Auvergne Grand-Rhône) -, une volonté se fait de plus en plus forte : « Comment capitaliser sur mon expérience en faveur du patient et de la santé ? », s’interroge-t-elle.

Le Centre Léon Bérard, où elle est suivie, accepte de financer sa formation au partenariat patient à l’université des patients à la Sorbonne. Elle pense à la pair-aidance, mais se ravise aussitôt : elle ne veut pas revivre le soin. Ensuite, tout s’enchaîne : elle commence une mission au CLB, intègre un comité de patients au cancéropôle Lyon Auvergne Rhône-Alpes (Clara). C’est là, en tant que jury, qu’elle fait la connaissance de la professeure Julie Haesebaert (HCL/Lyon 1). La rencontre sera déterminante.

Investie dans la recherche

Aujourd’hui, Laurie Panse est consultante en partenariat en santé. Elle assure entre autres des missions pour le compte de l’Inserm, des HCL et de l’université Lyon 1, collaborant avec le laboratoire de recherche en santé publique Reshape, implanté à la faculté de médecine Lyon Est.

Son statut de travailleuse indépendante lui offre la liberté de sélectionner les projets pour lesquels elle estime pouvoir apporter son expertise et sa motivation. Fière de contribuer à la recherche en santé publique, elle intègre au fil des mois son nouvel environnement professionnel et appréhende un peu plus encore les arcanes du milieu hospitalo-universitaire et académique.

En 2023, aux côtés de la docteure Laurence Havé et de la professeure Sophie Jacquin-Courtois, toutes deux spécialistes en médecine physique et réadaptation à l’hôpital Henry Gabrielle, et membres de l’équipe Trajectoires, laboratoire du Centre de recherche en neurosciences de Lyon (CRNL), elle contribue à la conception d’un chatbot ou agent conversationnel pour les patients souffrant de troubles cognitifs associés aux traitements du cancer. Jusqu’à 72 % des patients en cours de traitement peuvent être concernés.

Ces troubles, encore largement méconnus, se traduisent par des problèmes d’attention, de concentration, de mémoire pouvant impacter la vie sociale, familiale et professionnelle. « Moi-même j’ai connu ce brouillard mental, la difficulté à se concentrer, l’attention sélective... » Dans ce projet baptisé Cogitoscope, l’intervention de la patiente partenaire est particulièrement pertinente : elle allie ses compétences professionnelles et son savoir expérientiel.

La reconnaissance des patients

Elle anime des groupes rassemblant une douzaine de patients pendant toute une journée. Leurs commentaires vont nourrir l’agent conversationnel qui fonctionne dans un environnement clos et contrôlé pour éviter toute dérive éventuelle liée au ressenti ou aux émotions des utilisateurs. Par ailleurs, la conversation avec l’intelligence artificielle conversationnelle doit répondre aux exigences de la littératie en santé, c'est-à-dire la capacité du patient à comprendre, évaluer et utiliser l'information dans le but d’améliorer sa propre santé et de développer son autonomie dans le système de soin. 

J’ai le sentiment que les patients sont reconnaissants de mes interventions, confie Laurie Panse. Les patients et les chercheurs ont beaucoup à apprendre les uns des autres. C’est enrichissant pour nous tous qui voulons améliorer les parcours de soin.

Ce projet, lancé par les HCL et la Métropole de Lyon, est une expérience formatrice : « J’ai appris à être patiente car le temps de la recherche est long, mais y participer donne du sens à mon action ». 

« Je me sens vraiment à ma place »

Bien que l’avenir demeure incertain, elle veut plus que jamais se sentir utile et mettre ses compétences au service des patients, des aidants et, plus largement, des citoyens. « C’est très gratifiant de travailler dans le milieu de la santé. Bien qu’il ne soit pas simple de professionnaliser le statut de patient partenaire, je me sens complètement intégrée dans le laboratoire où je travaille. »

Parmi ses missions à venir, il y a celle menée pour la plateforme Platines des HCL, avec laquelle elle va porter la voix du partenariat patient dans des projets de santé numérique dédiés aux professionnels de santé de terrain, aux experts du numérique, aux laboratoires de recherche et aux industriels. 

À ceux qui voudraient se lancer dans le partenariat en santé, elle conseille : « Il faut se poser la question en quoi nos différentes expériences peuvent aider à faire avancer la santé de demain ? »

Dix ans après le diagnostic de son cancer, elle fait le bilan. « J’ai été capable de faire un grand pas de côté. Agir, oser permettent de dépasser nos peurs et nos limites. La relation de confiance qui s’est instaurée avec les chercheurs, les professionnels de santé et avec la patiente et aidante coordinatrice des HCL, Gwénaëlle Thual, tempère mon syndrome de l’imposteur. Aujourd’hui, je me sens vraiment à ma place. »

 

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