Syndrome de microdélétion 22Q11.2

Résumé
Il s'agit d'un syndrome caractérisé par une microdélétion de la région proximale du bras long du chromosome 22. Ce syndrome peut toucher plusieurs organes et associe généralement des malformations cardiaques, des particularités du visage, des doigts, des troubles auditifs et des anomalies de la vision.

Qu’est-ce que le syndrome microdélétion 22q11.2 ?

Il s’agit d’un syndrome caractérisé par une microdélétion de 3 Mb de la région proximale du bras long du chromosome 22, qui emporte plusieurs gènes, dont le gène TBX1, impliqué dans la cardiopathie. Cette délétion est hétérozygote, c’est-à-dire présente sur un seul des deux chromosomes 22. Elle survient très souvent de novo, c’est-à-dire qu’elle est produite accidentellement lors de la fabrication des gamètes de l’un des parents. Rarement, elle est héritée d’un parent, en général peu symptomatique mais cela justifie de vérifier l’absence ou la présence de cette microdélétion chez les parents du patient.
Le diagnostic est fait actuellement par le caryotype moléculaire à partir d’un prélèvement sanguin recueilli sur un tube EDTA. La présence de la microdélétion est vérifiée sur un caryotype standard avec une hybridation in situ fluorescente ciblée sur la région 22q11.2 chez le patient et ses parents.
Ce syndrome touche une personne sur 2000 à 4000 et prend des formes cliniques très variées qui peuvent concerner plusieurs organes. Il est important de faire le diagnostic le plus tôt possible pour dépister l’ensemble des atteintes possibles et les prévenir. Mieux vaut prévenir que découvrir trop tard les signes et les complications.

Quels sont les signes de ce syndrome ?

De nombreux organes peuvent être touchés. Les signes cliniques ont une sévérité très variable. Les particularités du visage comportent des fentes palpébrales étroites, des bords du nez rectilignes, la bouche étroite, les oreilles sont petites et rondes avec un lobule peu marqué ou absent, le menton est petit, il existe parfois une fente vélopalatine avec une voix nasonnée qui est également un signe d’appel pouvant faire évoquer le diagnostic. On observe aussi des doigts longs et fins, assez évocateurs du diagnostic de microdélétion 22q11.2.
Les personnes atteintes ont parfois des troubles auditifs transmissionnels aggravés par la fente vélopalatine, ou de perception.
Des anomalies de la vision (troubles de la réfraction, strabisme) peuvent être également observés.
On observe aussi des hypocalcémies causées par une hypoparathyroidie, des anomalies du bilan thyroïdien, une hypoplasie ou une aplasie thymique, des anomalies immunitaires touchant préférentiellement les lymphocytes T, parfois sévères, des malformations rénales variées.
Un grand nombre d’autres malformations peut être observé. Le bilan malformatif et sensoriel comprend une consultation de cardiologie incluant une échographie cardiaque et des gros vaisseaux, une échographie abdomino-pelvienne, si nécessaire des radiographies osseuses en cas d’anomalies des membres ou du dos, parfois une imagerie cérébrale qui peut révéler des malformations, et des examens ORL avec études de l’audition et ophtalmologiques. L’espérance de vie est liée aux atteintes, en particulier aux éventuelles malformations, notamment cardiaques.

L’intelligence est-elle conservée dans ce syndrome ?

Le plus souvent, l’intelligence mesurée par les tests psychométriques est dans les limites de la normale mais les enfants présentent souvent un retard psychomoteur, un trouble des apprentissages, rarement des signes autistiques, plus fréquemment un TDAH et à l’adolescence, il faut être vigilent en raison du risque de décompensation psychotique avec des hallucinations et du risque de schizophrénie augmenté.

Nous adressons les patients pré-adolescents à nos collègues pédopsychiatres ou psychiatres qui connaissent bien le syndrome et qui seront en mesure de dépister des petits signes avant-coureurs, resserrer la surveillance et prescrire des psychotropes le cas échéant. L’intégration sociale et professionnelle est très variable en fonction de l’atteinte neurocognitive et psychiatrique.

Plus globalement, quelle prise en charge préconisez-vous pour ces patients ?

Nous tentons toujours de maintenir les enfants dans un parcours scolaire classique avec des soutiens éducatifs en psychomotricité, orthophonie, ergothérapie et parfois des séances en psychologie individuelle ou de groupe. Des séances d’orthoptie peuvent être nécessaires.

La prise en charge peut être effectuée jusqu’à l’âge de 6 ans au CAMPS et ensuite avec l’aide d’un SESSAD qui pourra se déplacer au domicile familial ou à l’école.
La scolarité sera à adapter au niveau de l’enfant. Un protocole de soins sera établi pour la prise en charge des soins à 100 %, ainsi qu’un certificat médical pour le dossier MDPH. Une AESH pourra soutenir l’enfant dans ses apprentissages en milieu scolaire.

Plusieurs prises en charge peuvent être proposées en fonction des évaluations, en orthophonie, psychomotricité, ergothérapie, séances avec des psychologues… Ces soutiens relèvent en partie de la décision de la CDAPH qui est la commission décisionnelle de la MDPH.

Les patients sont moins souvent confiés aux généticiens à l’âge adulte, ce qui est dommage. Un suivi systématique est souhaitable à l’âge adulte, il permettrait de discuter plus spécifiquement des questions liées à la vie quotidienne, la parentalité, l’espérance de vie, et de la coordination du suivi au cas par cas.

Dans le contexte de cette prise en charge, quel est le rôle du généticien ?

Le généticien coordonne les prises en charge par les différents spécialistes d’organes, s’assure de la bonne prise en charge socio-éducative, en lien avec le pédiatre et le neuropédiatre. Il prescrit le test génétique qui permettra de poser le diagnostic de certitude de la microdelétion 22q11.2, et annonce le résultat à la famille, enfant et/ou parents selon l’âge.
Cette annonce se fait en consultation de génétique, de préférence en présence d’un(e) psychologue. Le généticien délivre des informations sur le pronostic et la prise en charge du syndrome, l’existence de l’association de patients (Génération 22) et remet la carte d’urgence, et donne le conseil génétique.
Le suivi des adultes est multidisciplinaire et dépend des atteintes de chaque personne, il pleut impliquer l’interniste, le médecin généraliste, le cardiologue, le psychiatre, l’endocrinologue. La coordination du suivi multidisciplinaire est souvent réalisée par le médecin généticien d’un centre de référence Anomalies du développement.

Quel conseil génétique délivrez-vous aux parents ?

Si la microdélétion est survenue de novo, comme c’est le cas habituellement, le conseil génétique est rassurant lors d’une future grossesse du couple parental, mais il existe un risque faible de mosaïque germinale, c’est-à-dire de la présence de cette microdélétion dans plusieurs gamètes chez l’un des parents, c’est la raison pour laquelle nous proposons systématiquement un diagnostic prénatal génétique qui peut être accepté ou non souhaité par les parents. Ce diagnostic prénatal implique de réaliser un prélèvement invasif de villosités choriales à partir de 12 SA ou de liquide amniotique à partir de 15 SA, qui comporte un risque incompressible de fausse couche de l’ordre de 0,5 %.
Si la microdélétion est héritée de l’un des deux parents, le risque de récurrence dans la fratrie de l’enfant atteint est de 50%, à chaque grossesse. Les parents ont le choix de demander ou non un diagnostic prénatal génétique, en fonction de leurs histoires personnelles, de leurs convictions…
Ce conseil génétique s’applique bien entendu à l’enfant atteint devenu adulte.

Dernière mise à jour le : mer 25/10/2023 - 17:56
Webinaire AnDDI-Focus

« Quoi de neuf sur le syndrome de Williams et Beuren et la délétion 22q11.2 ? » | Filière de santé AnDDI-Rares

Avec :

  • Pr Charles-Patrick EDERY (généticien clinicien)
  • Dr Massimiliano ROSSI (généticien clinicien)
  • Mme Coline POIZAT-AMAR (conseillère en génétique)