Chimiothérapie intrapéritonéale pressurisée par aérosols (PIPAC)
La PIPAC, qu’est-ce que c’est ?
La PIPAC qui signifie Chimiothérapie intrapéritonéale Pressurisée par Aérosols est une technique innovante dans le traitement des carcinoses péritonéales. Elle a été créée en Allemagne en 2013 par le Pr Marc-André Reymond. En 2016, l'hôpital Lyon Sud est devenu le premier hôpital à proposer cette technique en France, sous l’impulsion et la direction du Dr Naoual Bakrin (Lire : Chimiothérapie par aérosols : une naissance extraordinaire)
La PIPAC consiste à vaporiser de la chimiothérapie directement dans l’abdomen d’un patient lors d’une laparoscopie (cœlioscopie de l’abdomen) sous forme d’aérosol.
A qui propose-t-on la PIPAC ?
La PIPAC peut être proposée à des malades atteints d’une carcinose péritonéale qu’il s’agisse d’une carcinose d’origine colorectale, d’une carcinose gastrique, d’une carcinose ovarienne ou d’une maladie rare comme le pseudomyxome péritonéal ou le mésothéliome péritonéal.
Cette technique est actuellement un « plus ». Elle est proposée aux patients dont la maladie est stabilisée par l’administration régulière de chimiothérapie systémique (intra-veineuse) mais qui ne peuvent pas subir de CHIP pour l’instant, pour différentes raisons. Elle est répétée trois fois à six semaines d’intervalle.
La PIPAC ne fait pas concurrence au traitement de référence de la carcinose péritonéale qui est la chirurgie de cytoréduction associée à une CHIP. Elle apparaît plutôt comme un traitement complémentaire qui, à terme, pourrait être proposé à des patients trop fragiles pour supporter une CHIP, qui auraient développés une résistance temporaire aux chimiothérapies systémiques conventionnelles ou qui aurait une extension trop importante pour bénéficier d’une chirurgie complète avec CHIP.
Efficacité de la PIPAC
Plusieurs études cliniques ont été menées en Allemagne par l’équipe du Pr Reymond, le concepteur de cette technique. L’une d’elles a démontré une réponse clinique et/ou histologique dans plus de 60 % des cas chez des patientes en récidive d’une carcinose péritonéale d’origine gynécologique avec une résistance aux traitements de chimiothérapie conventionnelle.
Une étude de phase II portant sur la sécurité et l’efficacité de la PIPAC chez des patientes présentant une rechute platine-résistante d’un cancer de l’ovaire a permis de montrer plus de 70 % de réponses cliniques ou histologiques et ce, sans altération de la qualité de vie
Comment se déroule une PIPAC ?
Avant l’intervention
Une consultation chirurgicale a lieu avec un médecin spécialisé dans la PIPAC au Centre Hospitalier Lyon-Sud. Le chirurgien explique alors le déroulement de l’intervention chirurgicale ainsi que les bénéfices et les risques inhérents à celle-ci.
Une consultation d’anesthésie est également programmée. Elle permet aux médecins anesthésistes de faire le point sur les traitements médicaux habituels de chaque patient. Des traitements peuvent éventuellement être arrêtés quelques jours avant l’opération et/ou remplacés par d’autres produits.
Les patients entrent dans le service d’hospitalisation de chirurgie générale et digestive la veille de la PIPAC. Ils bénéficient à ce moment-là d’un bilan sanguin standardisé pour s’assurer de l’absence de contre-indication de dernière minute.
Pendant l’intervention
La PIPAC a lieu sous anesthésie générale, ce qui signifie que les patients sont endormis du début à la fin de l’opération. Le chirurgien réalise un pneumopéritoine à 12 mmHg. Le pneumopéritoine consiste à introduire de l’air dans la cavité abdominale (le ventre) pour permettre ensuite le passage d’une petite caméra et d’instruments chirurgicaux. Deux trocarts à ballonnets (les trocarts sont des tiges cylindriques creuses qui traversent la peau et qui permettent d’introduire la caméra et les instruments chirurgicaux) permettent l’exploration de l’abdomen, l’évaluation de l’étendue de la carcinose péritonéale et le prélèvement de biopsies. Un nébuliseur (MIP, Reger Medizintechnik, Rottweil) qui permet de projeter la chimiothérapie sous forme de fines gouttelettes est ensuite introduit. Cet appareil, spécialement conçu pour la PIPAC, est connecté à un injecteur haute pression.
Le bon déroulement de la procédure est observé en temps réel grâce à un autre trocart qui contient l’optique (la caméra). La chimiothérapie est nébulisée en quelques minutes puis laissée en suspension dans le ventre gonflé pendant trente minutes. L’exsufflation qui consiste à enlever l’air ayant permis la création du pneumothorax est réalisée en circuit fermé sur un filtre spécifique qui retient les molécules résiduelles de chimiothérapie encore en suspension. Une fois le tout évacué, les incisions sont refermées.
L’action combinée de l’aérosol et de l’hyperpression du pneumopéritoine permet une distribution homogène des agents médicamenteux dans l’abdomen ainsi qu’une pénétration en profondeur au sein des métastases péritonéales. Ce mode d’administration autorise une réduction des doses de chimiothérapie utilisées jusqu’à dix fois les doses conventionnelles, ce qui limite les effets indésirables généraux.
Après l’intervention
Après la PIPAC les patients sont transférés pour quelques heures en salle de réveil. Une fois réveillés, ils regagnent le service de chirurgie générale et digestive où ils restent environ 2 jours. Une surveillance infirmière régulière est mise en place le jour de l’opération ainsi que le lendemain notamment pour prévenir tout risque de douleur.
Les patients se lèvent le lendemain de l’intervention avec l’aide de la kinésithérapeute. L’alimentation est également reprise très vite de manière à limiter le jeun. Avant de quitter le service, un rendez-vous pour la prochaine PIPAC est remis à chaque patient. Une ordonnance pour des traitements antalgiques (contre la douleur) est également donnée à tous les malades.
Effets secondaires de la PIPAC
Pendant l’intervention
Le plus gros risque de la cœlioscopie est la création d’une plaie sur le tube digestif. En effet, avant de mettre les trocarts, les chirurgiens sont amenés à faire deux petites incisions sur le ventre des patients. Si une plaie est réalisée, elle sera immédiatement suturée et la PIPAC sera annulée et repoussée à une date ultérieure.
Il faut également savoir que dans 10 à 20 % des cas, la PIPAC, ne peut être pratiquée en raison d’adhérences (accolement entre deux organes abdominaux, séquellaire d’une précédente chirurgie ou due à l’évolution de la maladie) qui seront découvertes lors de la première tentative de PIPAC.
Après l’intervention
La douleur peut être importante le lendemain et le surlendemain de l’intervention. Des traitements adaptés sont donc mis en place par les médecins pour la contrôler.
Même si les cicatrices sont minimes au niveau de la paroi abdominale, elles peuvent s’infecter. Une attention toute particulière leur est donc portée afin d’éviter tout problème à ce niveau. En cas d’infection des soins infirmiers locaux peuvent être pratiqués et des antibiotiques mis en place pour quelques jours.
Enfin, le transit peut parfois mettre quelques jours à reprendre. Les médecins parlent alors d’iléus post-opératoire. Dans ce cas précis les malades seront remis à jeun en attendant un retour à la normale.
De nombreux centres français, spécialisés dans la prise en charge des carcinoses péritonéales projettent de s’ouvrir à la PIPAC. En transmettant aux équipes candidates son expérience, l’équipe chirurgicale de l'hôpital Lyon Sud poursuit la formation qu’elle a engagée depuis de nombreuses années avec la CHIP. En rendant les autres hôpitaux rapidement opérationnels il sera alors possible d’entrer dans une phase active d’évaluation de la PIPAC à l’échelle nationale.
Consulter aux HCL
- Service de chirurgie digestive et oncologique (Hôpital Lyon Sud)
- Cancer - Rubrique
Hôpital Lyon Sud
- Service de chirurgie digestive et endocrinienne