Kayna, 14 ans, greffée cardiaque

La vie de Kayna a basculé du jour au lendemain. Après un an d’hospitalisation, elle livre un témoignage rare et bouleversant.

La vie n’est pas juste. Mais pour Kayna, la question n’est pas là. Non, elle, ce qu’elle aimerait savoir c’est l’origine de sa cardiomyopathie dilatée, le nom de la maladie qui lui est « tombée dessus » un jour de l’été 2018. Cette année-là, elle avait participé au championnat de France de gymnastique artistique, sans symptômes particuliers. Alors quand les médecins lui ont appris sa maladie, en indiquant, qui plus est, « origine indéterminée », « Je ne voulais pas y croire » dit-elle.

 

« Ma fraction était à 12% »

« Tous mes organes étaient en souffrance, commente-t-elle, et quand ils ont fait l’échographie, ils ont vu que le problème venait du cœur ». Prise en charge à Bourgoin le 26 août 2018, elle est transportée deux jours plus tard à Lyon par hélicoptère. Le diagnostic révèle une cardiomyopathie dilatée caractérisée par une dilatation des ventricules et une faiblesse de la contraction du muscle cardiaque, entraînant une insuffisance cardiaque, une arythmie et un risque de mort prématurée. « Je suis arrivée à Lyon ma fraction d’éjection était à 12% »*, précise-t-elle d’une voix mesurée. La jeune patiente multiplie les allers et retours en service de réanimation, où la lycéenne qui veut devenir médecin poursuit ses cours, une première dans ce service de l’hôpital Louis Pradel ! Jusqu’au 23 octobre, date à laquelle elle est inscrite sur la liste des patients en attente d’une greffe. Mais, à tout moment, elle court le risque de perdre la vie par défaillance cardiaque. Alors, en décembre, les médecins décident de la placer sous l’assistance cardiaque du Berlin Heart, un cœur artificiel extracorporel qui doit lui permettre d’attendre la transplantation. Le jour d’après Kayna est opérée, « J’étais terrorisée ».

 

Un cœur pour elle 

Une canule aspire le sang qui entre dans le ventricule gauche à travers son apex (extrémité pointue de l’organe), et une autre canule refoule le sang dans la veine ascendante. Les pompes à sang sont à l’extérieur du corps et le système est relié à une console. Un traitement anticoagulant est prescrit. Les principales complications sont liées au risque infectieux puisque les canules traversent la peau. C’est précisément l’une des complications que va devoir surmonter Kayna. Mais avant, elle aura dû accepter cet état qui la tient assujettie à la machine 24h sur 24. « J’ai mis beaucoup de temps à accepter », confie la jeune fille. « Sans le Dr Koffel je pense que ma fille serait décédée aujourd’hui », ajoute Fahiza, sa mère. En effet, après l’opération, Kayna a développé un « syndrome de glissement » : anorexie, mutisme, léthargie. Le Dr Catherine Koffel « bouscule » alors la jeune patiente : « Au début je lui ai hurlé dessus, mais heureusement qu’elle était là. Elle m’a permis de vivre avec mon Berlin. » Les jours passent. Puis, le 28 février, à 8 heures du matin, l’anesthésiste entre dans sa chambre : « un cœur est pour toi ! » « L’instant le plus marquant de mon hospitalisation », confie-t-elle dans un sourire.

 

« Les médecins, c’était ma famille »

Après la greffe, des complications vont conduire les médecins à maintenir Kayna en coma artificiel. À son réveil, elle souffre d’une neuropathie de réanimation : « Tout mon côté gauche était paralysé. J’avais perdu sept kilos. J’ai beaucoup travaillé pour que ça revienne, par moi-même puis avec les kinés. » « J’étais triste, je pensais à la famille du donneur qui était en deuil. Mais j’étais aussi heureuse qu’il m’ait sauvé la vie ». Fin juin, elle retrouve son foyer après presque un an d’hospitalisation dont plus de six mois passés en réanimation. Depuis, elle demeure sous surveillance. « J’ai une hypertrophie du ventricule gauche. On fait des échos régulièrement. On va faire une biopsie pour voir s’il n’y a pas de rejet. Pour l’instant c’est stable. »

Aujourd’hui, Kayna veut remercier Fabienne Riot, l’aide-soignante, Roland Henaine le chirurgien, et tous les autres, infirmiers, aides-soignants et médecins, « Maman, elle venait de 11 heures à 21 heures. Et de 21 heures à 11 heures, les médecins c’était ma famille. »

*C’est l’expression numérique de la fonction pompe du ventricule gauche. Elle est considérée comme normale à 55% ou plus, et sévèrement anormale lorsqu’elle est inférieure à 30%.

Dernière mise à jour le : mar 20/07/2021 - 12:32
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