« La vie après la douleur », Blandine, patiente et pair-aidante à l’hôpital Pierre Wertheimer

C’est à la suite d’une opération bénigne que la vie de Blandine a basculé. Après des mois de douleurs, elle trouvera enfin l’apaisement grâce à l’implantation d’un neuromodulateur. Une expérience qu’elle partage cette année aux patients de l’hôpital Pierre Wertheimer.

 C’est confiante que Blandine s’est allongée sur la table d’opération. L’intervention, courte et bénigne, avait été planifiée pour lui permettre de rentrer chez elle après, où l’attendaient ses trois enfants. Mais rien ne s’est déroulé comme prévu. Et depuis, Blandine a vécu avec « l’invivable », dit-elle, en l’occurrence, une douleur intense et continue que des dérivés morphiniques n’ont pas même réussi à soulager. 

En juillet 2020, après des mois d’errance médicale, son médecin traitant l’adresse au service de médecine interne de l’hôpital Édouard Herriot. Là, enfin, un interniste pose les bonnes questions, parvient à décrire ses symptômes.

« Des sensations de brûlures dans toute la jambe. Je ne pouvais plus marcher normalement. Nous venions de déménager dans une maison avec des escaliers. J’avais peur de tomber avec mon fils dans les bras, alors âgé de 11 mois. »

Après des mois sans sommeil, des douleurs qui n’en finissent pas, une irritabilité prête à exploser à la moindre contrariété, elle trouve enfin une écoute et une compréhension salutaires. « En mars, mon généraliste m’avait prédit que je devrais sans doute prévoir de me déplacer en fauteuil roulant. J’étais sorti en pleurs de la consultation. Puis, avec l’interniste, j’avais des réponses et des pistes de traitement. » Pour autant, le calvaire de Blandine ne va pas s’arrêter là. 

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Blandine, patiente et pair-aidante à l’hôpital Pierre Wertheimer

Un traitement efficace, c’est possible ? 

« J’essaye plusieurs médicaments, principalement des dérivés morphiniques… malheureusement, aucun d’entre eux ne fait véritablement effet. J’arrête de travailler, puis je reprends en dents de scie, tentant de conjuguer douleurs et vie quotidienne du mieux que je peux. » En décembre 2020, un nouvel espoir se fait jour. Blandine, envoyée par son médecin traitant, consulte la neurochirurgienne Manon Duraffourg, dans l’unité de neuromodulation du service de neurochirurgie fonctionnelle, de la moëlle et des nerfs périphériques à l’hôpital Pierre Wertheimer.

« On commence par essayer de brûler les terminaisons nerveuses avec des patchs ; on tente la kétamine… en vain. »  Au début de l’année 2021, une nouvelle piste est explorée : la neuromodulation, technique consistant à implanter, en deux interventions, un neurostimulateur qui va envoyer des impulsions électriques de faible intensité au niveau des racines rachidiennes. 

« Le protocole s’étend sur un an. On passe devant un jury, composé de médecins, de la psychologue et de l’infirmière de l’unité. La question est de savoir si je vais supporter la pose d’un appareil qui sera en permanence dans mon corps », indique la patiente. Le 21 octobre 2022, la première intervention sous anesthésie générale permet de placer les électrodes le long de la colonne vertébrale : « Durant l’opération, on me réveille pour s’assurer qu’elles [les électrodes] sont bien positionnées. Ce n’était pas le cas. Le docteur Duraffourg les déplace, je le sens, ce n’est pas très agréable… » Pour autant, Blandine est confiante. « L’équipe m’a entourée. Je me suis sentie comprise, accompagnée. Le jour de l’intervention, le stress était grand mais l’infirmier de bloc opératoire m’a dit que tout avait été planifié, organisé, que j’étais courageuse d’accepter une nouvelle opération chirurgicale. La docteure Duraffourg est venue me voir, rassurante elle aussi. » La deuxième opération, sous anesthésie locale, réalisée six jours plus tard, donne lieu à l’implantation sous-cutanée du boîtier contenant la pile. Tout se déroule pour le mieux. Quant au suivi : « Avec Muriel, l’infirmière de l’unité, on a ajusté les réglages. Les jours qui ont suivi, je pouvais appeler, obtenir un rendez-vous rapidement, en cas de besoin, que ce soit avec la neurochirurgienne, la psychologue ou l’infirmière. » 

Une mission d’aide et de soutien 

« Du jour au lendemain, je n’ai pratiquement plus ressenti la douleur et j’ai retrouvé le sommeil, » indique Blandine, «  je revis, je remarche normalement, sans cannes, je peux même conduire à nouveau avec une jambe et un véhicule adapté. »

Soudain, la vie retrouve ses couleurs : « Je suis plus détendue, enfin soulagée… Il faut juste que je fasse attention aux portiques de sécurité des magasins qui désactivent le neuromodulateur, aux plaques de cuisson par induction, et les parcs d’attraction, les sports de combat, le ski me sont interdits. »  

En fin d’année 2023, Blandine se voit proposer d’intervenir comme pair-aidante auprès des patients de l’unité de neuromodulation en attente d’implantation. Elle participe même en tant que patiente partenaire à l’élaboration du projet qui consiste à organiser des groupes de parole réunissant trois patients partenaires déjà implantés. Les séances se déroulent en présence de l’infirmière et de la psychologue de l’unité, à raison d’une session toutes les six semaines pendant un an. « C’est très gratifiant de pouvoir accompagner des personnes sur la durée. Les effets sont positifs pour les personnes que l’on accompagne : elles posent leurs questions sans détours, sachant que nous avons vécu la même expérience, nous sommes d’autant plus crédibles.  C’est aussi réparateur de constater que l’on peut aider, rassurer, redonner confiance. » 

Elle a fêté ses 37 ans au dernier jour de mai. Après « ces jours terribles durant lesquels je n’avais pas le choix que de continuer à avancer », dit-elle, elle tient à exprimer sa gratitude à ceux qui l’ont soutenue : au premier chef, son mari, son employeur qui a adapté son poste de travail, et bien sûr l’équipe des HCL qui continue à la suivre. « Aider les autres est une mission noble. Je ne sais pas encore, mais peut-être que je pourrais changer de vie et embrasser à mon tour une profession soignante… »  

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