Cancer de la prostate : la révolution des ultrasons focalisés

C’est une première mondiale. En alternative aux thérapies standards radicales que sont la chirurgie et la radiothérapie, le service d’urologie de l’hôpital Edouard Herriot propose un nouveau traitement non-invasif par ultrasons dans le cadre d’une évaluation clinique.

Le Focal One®, installé dans le bloc opératoire du pavillon V est le premier dispositif au monde qui associe les avantages de l’imagerie par IRM pour localiser les tumeurs, de la fusion de l’image d’IRM et de l’échographie 3D et les ultrasons focalisés à haute intensité. L’objectif : émettre les ultrasons directement sur la zone de la prostate atteinte par le cancer, en épargnant les tissus sains alentours, réduisant ainsi au maximum les risques d’incontinence et d’impuissance.

Mieux cibler pour mieux traiter

Pionnier dans le domaine, le service d’urologie de l’hôpital Edouard Herriot a mis au point et utilise depuis de nombreuses années les ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) pour traiter toute la prostate (Ablatherm). Le principe de la thérapie focale est de détruire de manière ultra ciblée la zone atteinte par le cancer en laissant le reste de la prostate intact. Pour cela, l’unité de recherche LabTau (INSERM, Lyon 1) et les Hospices Civils de Lyon, en collaboration avec la société de haute technologie médicale EDAP TMS, ont développé un nouvel appareil : Le FocalOne®.

D’abord testée dans le cadre d’un protocole de recherche, la machine a permis de traiter près de 200 patients depuis son installation au bloc en juin 2011. Les HCL sont le seul CHU de France (et du monde) à posséder cet équipement dernière génération et donc, à proposer ce nouveau traitement du cancer de la prostate adapté aux tumeurs localisées à risque faible et intermédiaire dans le cadre d’une évaluation clinique.
La technique Focal One® repose sur l'utilisation d'ultrasons ultra-ciblés émis par une sonde endorectale et focalisés sur la zone de la prostate à traiter. Le robot offre une précision de traitement jamais égalée. Tout comme les rayons solaires passant à travers une loupe peuvent développer une grande chaleur au point de focalisation, les ultrasons passant à travers différents tissus peuvent produire au point focal une chaleur intense (entre 80 et 100°C). Cette élévation de température provoque la destruction instantanée et définitive (nécrose de coagulation) du tissu à l'intérieur de la zone ciblée.
Le traitement consiste en 400 à 600 tirs d'ultrasons focalisés de haute intensité. Chaque "tir" détruit un cylindre de tissu mesurant 5 mm de long sur 1.7 mm de diamètre. L’intervention est réalisée sous anesthésie locorégionale en une seule séance allant de 30 minutes à 2h en fonction du volume à traiter.
Aujourd’hui, les patients sont hospitalisés 48h mais les chirurgiens espèrent faire évoluer rapidement cette procédure vers une prise en charge en ambulatoire. Aucune cicatrice ni de suites douloureuses après l’intervention.

L’imagerie à tous les stades de l’intervention

Préalablement au traitement, le patient passe une IRM à partir de laquelle les zones suspectes de la prostate sont identifiées, puis confirmées au cours d’une biopsie échoguidée. Ces images sont chargées dans la machine Focal One®. Au cours de l’intervention, la sonde de traitement introduite dans le rectum permet à son tour l’acquisition d’une image échographique 3D de la prostate. L’image échographique et l’image de l’IRM sont alors fusionnées dans le volume 3D de la prostate permettant un repérage précis de la tumeur. La zone à traiter est ensuite définie en fonction de l’ensemble de ces données et visible sur l’échographie temps réel du patient.

Une des grandes avancées permises avec le Focal One®, c’est la possibilité pour le chirurgien de contrôler la zone traitée en temps réel et d’ajuster le traitement au cours de la même intervention : « Une échographie de contraste réalisée en peropératoire permet de visualiser la zone traité,et au cas où la tumeur n’aurait pas été totalement détruite, de compléter le traitement, au cours de la même intervention », explique Sébastien Crouzet, chirurgien urologue à l’hôpital Edouard Herriot (HCL). Les faisceaux ultrasonores réalisés par la machine peuvent également être ajustés en longueur et en profondeur en temps réel, « ce qui évite au patient une seconde opération et réduit le risque d’oubli d’une portion de la tumeur puisque son contour peut être ciblé plus précisément ».

Une sexualité préservée

Alors qu’une chirurgie classique comporte des risques d’impuissance (50%) et d’incontinence (10%), les patients opérés par ultrasons focalisés présentent bien moins d’effets secondaires. Le service d’urologie de l’hôpital Edouard Herriot évalue actuellement ce traitement dans le cadre d’études multicentriques comportant entre autre 200 patients avec traitement de la moitié de la prostate et 30 patients avec traitement purement focal. Dans le cadre d’un traitement focal, au-delà de la destruction totale de la tumeur par le Focal One®, le risque de diminution de la qualité des érections est très faible et aucun n’a connu d’épisodes d’incontinence après le traitement.

De plus, contrairement à la radiothérapie, ce traitement n’implique pas de dose maximale et peut donc être répété. Les ultrasons focalisés à haute intensité ne sont pas toxiques pour les tissus environnant la prostate. Face à certains échecs thérapeutiques, ils représentent alors une nouvelle issue pour des patients dans l’impasse.

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Dernière mise à jour le : ven 22/10/2021 - 10:37