Une prothèse mitrale « biomimétique » implantée pour la première fois chez l’humain

Une équipe de chirurgie cardiaque de Turin, avec l’aide du Pr Marco VOLA, chef du service de chirurgie cardiaque adulte de l’hôpital Louis Pradel, a implanté pour la toute première fois dans le cœur d’un patient un nouveau modèle de valve mitrale artificielle, conçu pour imiter la forme naturelle de la valve humaine et restaurer le flux sanguin physiologique entre les différentes parties du cœur. Une procédure récemment publiée dans un article du JACC Cardiovascular Interventions, du Collège de Cardiologie Américain.

La valve mitrale – qui tient son nom de la mitre, couvre-chef porté par les évêques - est l’une des quatre valves du cœur. C’est cette valve, composée de deux feuillets asymétriques, dont un prépondérant (grande valve), qui s’ouvre pour faire passer le sang de l’oreillette gauche vers le ventricule gauche puis se ferme pour empêcher le sang de refluer vers cette même oreillette. Certaines conditions pathologiques peuvent affecter l’étanchéité de la valve mitrale et perturber le flux sanguin physiologique naturellement dirigé vers l’aorte : lorsqu’elle ne peut être réparée, la valve mitrale est remplacée par une prothèse.

À ce jour, les prothèses biologiques utilisées comportent trois feuillets équivalents. Mais une première mondiale vient d’être réalisée à Turin (Italie) : un nouveau modèle de prothèse, baptisé Epygon, a été implanté chez l’humain. Epygon est une valve artificielle transcathéter – implantée sans circulation extra corporelle – qui imite la forme en D de la valve mitrale humaine et la distribution naturelle des feuillets mitraux.

Le Pr Marco VOLA, chef du service de chirurgie cardiaque adulte de l’hôpital Louis Pradel, a sélectionné l’équipe qui allait procéder à cette délicate première et, le jour J, a supervisé et participé à l’implantation au sein du bloc turinois. Dans l’article publié dans le JACC Cardiovascular Interventions, l’équipe retrace la procédure et identifie les bénéfices de la prothèse Epygon pour les patients. La valve est conçue pour pouvoir être implantée à travers un cathéter, donc sans recours à une chirurgie comportant une ouverture et un arrêt du cœur. La forme et le design de la prothèse offrent aussi d’intéressantes avancées, puisqu’ils visent à gêner le moins possible l’entonnoir naturel, dit chambre de chasse, qui conduit à la valve voisine, la valve aortique. Davantage de patients pourraient ainsi être éligibles à une implantation, puisque les risques d’obstruction de l’entonnoir par la prothèse seraient réduits. Enfin, parce qu’elle imite fidèlement la disposition naturelle des feuillets mitraux, la prothèse Epygon devrait permettre de générer moins de turbulences dans le ventricule gauche, donc d’exiger moins d’énergie de la part du muscle cardiaque. L’étude des vortex dans le ventricule gauche est d’ailleurs un axe de recherche aux Hospices Civils de Lyon : le CHU collabore notamment avec l’INSA pour mieux comprendre ces phénomènes.

« Conçue par une start-up basée près de Turin, en Italie, le projet Epygon a été financé en phase précoce par le groupe français Affluent Medical. La conception, la fabrication, les tests précliniques et l’implantation de la prothèse chez l’humain font ainsi partie d’un procès d’innovation vertueux non seulement car de haute technologie biomédicale mais aussi, et surtout, car mené en circuit court entre la France et le Piémont.
L’innovation doit améliorer la prise en charge des patients en élargissant le spectre des solutions qui leur sont proposées. Il est primordial de prendre le temps d’étudier la technique qui conviendra le mieux à chaque cas. C’est une médecine qui devient de plus en plus personnalisée et réalisée par des équipes multidisciplinaires, qui impliquent les chirurgiens cardiaques, les cardiologues, les anesthésistes et les radiologues », résume le Pr Marco VOLA.

Aux Hospices Civils de Lyon, la recherche et l’innovation de haut niveau dans le domaine mitral sont une tradition de longue date. Le Pr Marco VOLA est l’auteur du premier remplacement chirurgical d’une valve humaine totalement endoscopique publié en 2014 et porte un programme de recherche hospitalo-universitaire en santé (RHU) accrédité par l’Agence nationale de la recherche et focalisé sur la réparation mitrale transcatheter. Son prédécesseur à la tête du service de chirurgie cardiaque de l’hôpital Louis Pradel, le Pr Jean-François OBADIA, a développé en France l’approche vidéo pour la chirurgie de réparation mitrale et coordonné l’étude MITRA-FR, laquelle a évalué l’efficacité clinique de la pose d’un clip sur les feuillets mitraux pour l’insuffisance mitrale secondaire.

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Dr Thomas VARIN, Dr Matteo POZZI, Pr Marco VOLA, Dr Daniel GRINBERG
Dr Thomas VARIN, Dr Matteo POZZI, Pr Marco VOLA, Dr Daniel GRINBERG

 

Le Pr Marco VOLA est le nouveau chef de service du service de chirurgie cardiaque adulte de l’hôpital Louis Pradel. Le référent pour la filière valvulaire mitrale se dit « fier de coordonner une équipe soudée, jeune mais déjà experte, composée de chirurgiens formés à toutes les opérations et capables également d’hyperspécialisation dans les filières dont ils sont responsables : le Dr Matteo POZZI, référent pour la chirurgie de la transplantation et assistance mécanique, le Dr Daniel GRINBERG référent pour la filière de l’aorte et le Dr Thomas VARIN pour celle de la revascularisation des coronaires.»

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Dernière mise à jour le : lun 22/01/2024 - 16:16
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