"Revendiquer le droit de prendre soin de soi", Anne-Christine Henk, patiente des HCL

À l’approche de ses 60 ans, Anne-Christine Henk voit son quotidien bouleversé par un diagnostic inattendu de cancer du sein. De la colère à l’acceptation, du bloc opératoire aux ateliers artistiques, elle raconte son chemin de résilience, son rapport à la maladie et la manière dont elle apprend à "prendre soin d’elle".

Anne-Christine Henk, cadre à l’Université Claude-Bernard Lyon 1, se définit comme quelqu’un qui "adore la vie", aime rire et cultive le positivisme. C’est justement cette énergie qui a rendu d’autant plus difficile l’arrêt brutal imposé par un burn-out. Deux mois plus tard, elle découvre une boule sous son aisselle. Pas la plus assidue aux mammographies, elle tente d’abord de se rassurer, persuadée que "ça allait". Jusqu’à l’annonce du diagnostic : un cancer du sein.

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Une femme avec un veste a rayures pose dans des escaliers extérieurs, adossée à la rembarde. En arrière plan, le ciel est bleu, des arbres avec des feuilles vertes et un bâtiment..

Je pensais avoir tout fait pour éviter ça en ayant allaité mes trois enfants. Je croyais que cette partie de mon corps était à l’abri, confie Anne-Christine Henk.

Enchaîner un burn-out puis un cancer lui apparaît alors comme "le pire combo", mais aussi, avec le recul, comme une forme de renaissance. Aujourd’hui, elle reconnaît que son corps lui avait envoyé de nombreux signaux.

À chaque étape, "une attention humaine incroyable"

En avril 2024, elle devient patiente des Hospices Civils de Lyon, elle qui n’avait jusque-là jamais connu de problème de santé. Elle découvre alors les services et pavillons des hôpitaux de la Croix-Rousse et d’Édouard Herriot.

Sa prise en charge débute à l’hôpital de la Croix-Rousse, au sein de l’équipe spécialisée en pathologies gynécologiques et mammaires. Sa gynécologue, la Docteure Julie Bienstman Pailleux, qui consulte dans le service de gynécologie-obstétrique, accepte de l’opérer.

Les étapes du parcours s’enchaînent rapidement, et Anne-Christine Henk ne garde pas de mauvais souvenir de cette période. Le cadre est structuré, clair, et aux HCL, tout est mis en œuvre pour faciliter le quotidien des patients. Des deux interventions - la première le 23 mai, puis un curage ganglionnaire le 27 juin 2024 - elle retient avant tout la bienveillance des soignants : "Même la brancardière me mettait un drap chaud avant le bloc. À chaque étape, j’ai senti une attention humaine incroyable."

Un choix difficile : refuser la chimiothérapie

Elle reconnaît toutefois que le stress lié à l’attente des résultats est une épreuve à laquelle personne n’est réellement préparé. Les dialogues intérieurs, constants entre l’esprit et le corps, ne peuvent pas toujours être exprimés. Un moment charnière survient lors de son entretien avec l’oncologue, au cours duquel elle prend la décision difficile de renoncer à la chimiothérapie.

"On vous demande de choisir, c’est violent, alors qu’on voudrait juste qu’on nous dise quoi faire, mais en RCP, les avis n’ont jamais pu être tranchés, précise la patiente. J’ai finalement refusé la chimiothérapie au profit de la confiance que je faisais à mon corps, en accord avec l’oncologue, et j’ai suivi une radiothérapie et une hormonothérapie."

L'art comme soutien

Au-delà des soins médicaux, Anne-Christine Henk a découvert les bienfaits des soins de support et la force des projets artistiques proposés aux patientes. En effet, des équipes pluriprofessionnelles, et en particulier de Nathalie Piazzon, infirmière en pratiques avancées (IPA), et de la Dr Marion Cortet, portent les projets "santé culture" dans leur domaine. 

De l’écriture à l’art plastique, en passant par le stand-up, elle a choisi de parler de sa prise en charge avec un humour parfois satirique. Avec l’aide de Bamba Fall, Charlotte Fermand et Nolwenn Guéhenneux, Anne-Christine et dix autres patientes en oncologie des HCL ont participé à un spectacle de stand-up au Théâtre de la Croix-Rousse, visant à intégrer l’art dans l’accompagnement des patients atteints de cancer.

"Ça peut paraître étrange, mais j’ai trouvé beaucoup de positif dans cette période, dit-elle. J’ai appris à prendre soin de moi, sans culpabilité. Même dans la maladie, il y a des portes à ouvrir vers la vie."

Dans le cadre de sa prise en charge, Anne-Christine Henk a pu bénéficier d’un parcours de réhabilitation par le sport au sein du service d’explorations fonctionnelles respiratoires et de médecine du sport à l’hôpital de la Croix-Rousse. Ce programme lui a permis de retrouver confiance en son corps, grâce à une équipe pluriprofessionnelle et bienveillante qui l’a soutenue.

Un nouvel équilibre de vie

Aujourd’hui, en temps partiel thérapeutique, sa hiérarchie à l’Université Claude-Bernard Lyon 1 lui a proposé de prendre en charge des missions liées à la qualité de vie et aux conditions de travail. 

Elle profite pleinement de moments avec ses petits-enfants, de ses marches et de son sport adapté. Elle dit avoir apprivoisé une peur ancienne : "J’ai passé ma vie à redouter la mort. Aujourd’hui, je l’accepte. En outre, j’aime trop la vie pour ne pas en profiter au maximum et comme j’aime à le dire, ‘je compte bien jouer les prolongations’."

Pour Anne-Christine Henk, son parcours ne se résume pas à une simple histoire de maladie : il constitue une leçon plus large sur la nécessité de mieux prendre en compte la santé des femmes, dans toute sa complexité. "Pendant longtemps, on a minimisé nos symptômes et pas toujours su comment accompagner la femme au mieux dans la dernière phase de sa vie hormonale. La santé des femmes mérite une vraie reconnaissance, une vraie prise en charge adaptée. Cela passe par le dépistage régulier, le sport, la nutrition et prendre soin de soi", insiste-t-elle.

Son message est clair : il faut apprendre à s’écouter et revendiquer le droit de prendre soin de soi. Ce n’est pas de l’égoïsme, mais une nécessité de montrer aux générations futures qu’elles ne doivent pas mettre leur santé entre parenthèses.

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La santé des femmes mérite une vraie reconnaissance, une vraie prise en charge adaptée. Cela passe par le dépistage régulier, le sport, la nutrition et prendre soin de soi, insiste Anne-Christine Henk.