Soins palliatifs : une démarche qui ne se limite pas à la fin de vie

07/10/2023 Journée mondiale des soins palliatifs
Les soins palliatifs est une discipline méconnue qui fait souvent l’objet d’idées fausses. Des soins actifs délivrés par une équipe pluridisciplinaire dans le cadre d’une approche globale.

S’il existe plusieurs définitions des soins palliatifs, toutes s’accordent sur un point qui va à l’encontre de l’imaginaire collectif : la démarche palliative ne se limite pas à la fin de vie. Au contraire, elle est d’autant plus efficace qu’elle est mise en œuvre dès l’annonce d’une maladie grave dont on sait qu’elle ne guérira pas ou lors de la survenue d’une complication sévère.

« Dans le service, il nous arrive régulièrement de revoir des patients au cours de différents séjours. Il y a un patient que nous suivons depuis près de 10 ans !, souligne le Pr Elise Perceau-Chambard, cheffe du service. Les unités de soins palliatifs sont des centres d’expertise et de ressources dans de nombreuses situations, en particulier pour les symptômes rebelles et en premier lieu, la douleur ».

Ce sont des soins actifs délivrés par une équipe pluridisciplinaire dans le cadre d’une approche globale. L’unité du Pr Perceau-Chambard permet d’allier l’expertise dans le soulagement des symptômes de douleur et d’inconfort, le soin personnalisé, la souffrance psychologique, sociale et spirituelle mais aussi le soutien et l’accompagnement de l’entourage du patient. De nombreux métiers interviennent au sein du service (kinésithérapeute, ostéopathe, art-thérapeute, socio-esthéticienne…) et l’apport des bénévoles fait également partie intégrante de la démarche. La moyenne d’âge des patients est de 60 ans et la durée moyenne de séjour de 11 jours.

Si 40% des patients admis en soins palliatifs décèdent, 60% d’entre eux  rejoignent leur service d’origine, retrouvent leur domicile ou intègrent un établissement de SSR  ou un EHPAD.

À l’hôpital Lyon Sud, les soins palliatifs occupent une place centrale et collaborent de manière étroite avec les services de spécialités. « Notre rôle s’apparente souvent à celui d’un service de transition ou d’un sas, précise Dorothée Decrept, cadre du service. Elle cite l’exemple de patients hospitalisés de longs mois en unité stérile dans le service d’hématologie clinique de l’hôpital. Le choc du retour à domicile avec des soins serait trop brutal ; ils ont besoin de passer par une prise en charge intermédiaire et encadrée avant de se retrouver seuls chez eux. Nous les aidons à franchir ce pas ». Ainsi, l’unité d’hospitalisation s’intègre au sein d’un service comprenant plusieurs équipes mobiles intra et extrahospitalières (EMSP), présentes sur les groupements hospitaliers Sud, Nord et les services de gériatrie de l’I-Vie (Institut du vieillissement) des HCL :

  • Les équipes mobiles intrahospitalières vont au contact des patients identifiés par les médecins dans les services de spécialités, pour préparer en amont leur arrivée en unité d’hospitalisation de soins palliatifs, dans les meilleures conditions.
  • Les équipes extrahospitalières visitent les patients à leur domicile ou dans les structures SSR et EHPAD à leur sortie du service. L’objectif : adoucir la transition, assurer la continuité des soins et vérifier que tout se passe bien pour eux. « Avec cette organisation, nous voulons éviter tout passage aux urgences pour nos patients », complète le Pr Perceau-Chambard.
  • Deux hôpitaux de jour accueillent en journée ou demi-journée des patients de gériatrie et d’hématologie mais également des patients atteints de maladies graves, évolutives ou incurables, comme les cancers, les pathologies neurodégénératives, les insuffisances cardiaques et rénales.
    Situés à l’hôpital Lyon Sud et à l’hôpital Edouard Herriot, ils permettent une prise en charge personnalisée en fonction des symptômes et besoins. Objectif :  soulager les douleurs et favoriser le maintien à domicile des patients suivi tout en améliorant leur qualité de vie. 
    Les patients pourront être amenés à rencontrer selon leurs besoins, médecins, infirmiers, kinésithérapeutes, psychomotriciens, psychologues, assistants sociaux, diététiciens… et, ce, pour une évaluation pluridisciplinaire de leurs besoins ainsi que ceux de leurs aidants avec des ressources hospitalières. Les patients, suivis ou non aux HCL, peuvent être adressés par leur médecin référent ou par l’équipe mobile de soins palliatifs. 

« Ces deux hôpitaux de jour s’inscrivent dans une démarche complète d’équilibration des symptômes, qui vise également à innover en matière de prise en charge de la douleur », souligne le Pr Elise PERCEAU-CHAMBARD. « Tout ce travail pluridisciplinaire permet de construire avec le patient son projet de soins, de bénéficier de temps privilégiés pour évoquer l’évolution de la maladie et réfléchir aux directives anticipées », complète le Dr Sophie FRANCIONI.

 

Une discipline résolument innovante

La représentation simpliste des soins palliatifs avec des soignants au chevet des patients, leur tenant la main est totalement erronée. Les soins palliatifs allient une haute technicité et un soin centré sur les besoins du patient. « Lorsqu’ils arrivent dans le service, les professionnels fraîchement embauchés sont souvent surpris par le nombre de soins », explique Dorothée Decrept, la cadre du service. Le Pr Perceau-Chambard souligne une réelle professionnalisation et une universitarisation de la spécialité ces dernières années, qui se poursuit avec la nomination d’un praticien hospitalo-universitaire (PHU) dans le service en novembre 2022.

La lutte contre les douleurs complexes et rebelles mobilise les efforts et fait appel à de nombreuses techniques médicamenteuses (Méthadone, Kétamine, Capsaïcine, la TENS (Trans Electro-neuro Stimulation) ou l’analgésie par voie intrathécale et non médicamenteuses (art-thérapie, musicothérapie, hypno-analgésie, résonnance magnétique par stimulation cutanée…).

Dans cette dynamique d’innovation, l’expérimentation du cannabis à usage médical a débuté dans le service de soins palliatifs de l’hôpital de la Croix-Rousse et de Lyon Sud, sous l’égide de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des dispositifs de Santé (ANSM) : les médecins sont formés à la prescription de spécialités cannabinoïdes et pourront proposer cette thérapeutique originale et prometteuse aux patients suivis dans le service, que cela soit dans le cadre de leur hospitalisation, ou en ambulatoire.

Un autre projet remarquable est celui des masques de Réalité Virtuelle pendant ou en dehors des soins. Cette technique, déjà utilisée par les services d’oncologie, permet de réduire l’anxiété et les douleurs, notamment à l’occasion de soins complexes. Les séances durent une vingtaine de minutes. « Nous les utilisons aussi pour permettre à nos patients de partager des souvenirs de voyage par exemple ou des expériences avec des membres de leur entourage, lors de visites », complète Dorothée Decrept.

D’autres initiatives sont à l’étude et sont amenées à faire l’objet de projets de Recherche, à l’instar de la zoothérapie. « Nous étudions l’idée d’accueillir de manière pérenne un animal dans le service, comme à l’hôpital gériatrique des Charpennes avec Eliott le labrador, pour stimuler nos patients ». L’idée est née suite à la visite d’un patient par son chien. « Parce qu’il est difficile de se séparer de son animal de compagnie, nous autorisons parfois leur venue dans le service. Ça redonne le sourire à nos patients, raconte le Pr Perceau-Chambard. Dans ce cas précis, les autres résidents avaient entendu aboyer le chien et ont commencé à poser des questions, à vouloir le voir. Du coup, son propriétaire a fait le tour du service pour rendre visite aux autres patients ! ».

«L’unité de soins palliatifs est un service résolument ouvert vers la vie et l’extérieur, permettant aux patients de se projeter, malgré la maladie. La crise sanitaire a imposé des adaptations à ces grands principes, mais l’esprit du service a été préservé ».

 

Projet INSPIRE : pour une fin de vie moins douloureuse chez les malades du cancer

Lauréat de l’appel à projets européen Horizon Europe 2021 et porté aux HCL par le Dr Guillaume ECONOMOS du service de soins palliatifs de Lyon Sud, le projet INSPIRE (INtegrated Short term PallIative REhabilitation to improve quality of life and equitable care access in incurable cancer) vise à évaluer l’intérêt d’un programme de réhabilitation précoce chez les patients atteints de cancers avancés.

Concrètement, il s’agit de tester l'efficacité clinique et le coût de trois interventions de réhabilitation palliative précoce non-médicamenteuses et n’entrant pas dans le soin courant (techniques de respiration, mobilisation passive, techniques d’"épargne" du patient pour éviter la douleur, conseils alimentaires…) sur l’amélioration de la qualité de vie, la diminution des capacités et les symptômes chez les personnes atteintes d'un cancer incurable.
Le projet comprend un essai contrôlé randomisé multinational dans cinq pays européens dans lequel seront recrutés 340 participants. En cas de succès, l'essai pourrait aboutir à une intervention évolutive qui améliorerait les fonctions et la qualité de vie des personnes atteintes d'un cancer incurable mais aussi celle de leurs proches.

Les HCL coordonnent ce projet au niveau européen en partenariat étroit avec le King’s College London qui en assure la coordination scientifique. Les HCL sont assistés dans cette coordination par Lyon Ingénierie Project, filiale des Hospices Civils de Lyon et de l’Université Claude Bernard Lyon 1.

Dernière mise à jour le : mer 14/02/2024 - 08:47
Blocs libres